République Démocratique du Congo (RDC) : évaluation initiale de l’impact de la pandémie de coronavirus sur le secteur extractif et sur la problématique de la gouvernance des ressources
Ce document fait partie d’une série d’analyses par pays produites par NRGI pour résumer la situation en ce qui concerne la pandémie et ses impacts économiques. L’analyse qu’il contient est susceptible de changer en fonction de l’évolution de cette situation et sera mise à jour en temps utile.
Messages clés
- La pandémie de coronavirus a aggravé la situation économique déjà précaire de la RDC. Les priorités du gouvernement ont été l’obtention d’un allègement de la dette et la conclusion de nouveaux prêts.
- La RDC est fortement tributaire des revenus miniers et est confrontée à une baisse significative de ses recettes en raison de la baisse des prix des matières premières et des perturbations créées par la pandémie dans les activités minières du pays.
- La RDC espère profiter d’un redressement éventuel des prix des matières premières ; mais sans des réformes de fond dans la gouvernance du secteur, en particulier celle des entreprises d’État, le pays ne sera probablement pas en mesure d’en tirer profit
Vue d’ensemble de l’impact économique de la pandémie de coronavirus
La RDC était déjà dans une situation économique précaire lorsque la pandémie de coronavirus a frappé le pays en mars 2020, laissant derrière elle une économie encore plus dévastée. Au début du mois d’avril, les réserves monétaires de la Banque centrale du Congo s’élevaient à 693 millions de dollars américains, soit l’équivalent d’à peine deux semaines d’importations. Le Président de la République, M. Felix Tshisekedi, a décrété l’état d’urgence le 23 mars, occasionnant ainsi la fermeture des frontières nationales et l’isolement de la Ville de Kinshasa, considéré comme épicentre de la pandémie, avec le reste des provinces du pays.
Le gouvernement a dû revoir à la baisse sa prévision initiale de croissance pour 2020, la ramenant de 4 % à 1 %. Le Fonds Monétaire International (FMI) avait, à cet effet, déclaré que la pandémie aurait un impact économique et social considérable sur la RDC, prédisant que l’économie connaîtrait une contraction de 2,2 % en 2020, contre une estimation de croissance de 3,9 % avant la pandémie.
Le pays ne dispose pas de réserves financières tirées de l’exploitation extractive. Ainsi, la priorité du gouvernement a été d’obtenir un allègement de la dette et de faire aboutir le processus en cours de négociation des nouveaux prêts auprès de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international et de la Banque africaine de développement. Le FMI lui a concédé en avril une facilité de crédit rapide de 363,3 millions de dollars US.
Impact sur le secteur minier
La RDC est confrontée à une baisse de la production minière car les mines ont cessé ou ralenti leurs activités en raison de la pandémie et de la chute de la demande de certains minerais. Plusieurs mines ont donc suspendu ou réduit leurs opérations. C’est le cas par exemple de Frontier, une filiale d’Eurasian Resources Group, qui a annoncé la suspension de ses activités avec le risque d’entraîner la perte de 1 400 emplois. Selon l’agence de presse Reuters, l’entreprise Chemaf, filiale de l’entreprise Shalina Resources basée à Dubaï, a fermé son usine de traitement du cuivre-cobalt d’Usoke et stoppé, en même temps, les travaux de construction de son usine de Mutoshi en réaction à la pandémie. Chemaf a également fermé temporairement le site minier artisanal de cobalt de Mutoshi, approvisionnant le négociant en matières premières Trafigura. Le 2 avril, Ivanhoé a annoncé des mesures de quarantaine et de confinement à Kamoa-Kakula et Kipushi, précisant que ce dernier site avait également temporairement suspendu ses opérations. China Molybdenum a mis en quarantaine sa mine de cuivre et cobalt de Tenke Fungurume fin mars, bien qu’il soit difficile de dire si cette mesure a conduit à un recul de la production, le personnel étant resté bloqué sur le site.
Le ministre des Mines de la RDC a rapporté en avril une augmentation de 12,75 % des exportations de cuivre et une baisse de 15 % des exportations de cobalt pour le premier trimestre 2020, par rapport à 2019. Il a fait observer que si la demande et les cours étaient à l’origine du problème, ces facteurs n’étaient pas aussi importants que les contraintes se rapportant à la production. Le ministre a également déclaré que la fermeture des mines pouvait occasionner une crise économique et sociale « catastrophique » en RDC. Il a reconnu la forte dépendance de la RDC vis-à-vis de la Chine en termes de récupération de la demande de cuivre et de cobalt : son opinion est que les prix pourraient augmenter au fur et à mesure de la reprise de la demande chinoise, mais la RDC ne pourrait en profiter que si la production se maintenait.
L’industrie minière fait aussi face à des problèmes en matière de transport, liés aux restrictions en vigueur au niveau national et international, affectant les exportations de minerais et l’importation d’intrants essentiels ou l’arrivée de spécialistes du secteur. Le ministre des Mines souligne le possible impact négatif des restrictions de mouvement en Afrique du Sud, Durban étant le port d’où les minerais de la RDC sont expédiés vers l’Asie. Katanga Mining, filiale de Glencore, a annoncé des retards dans l’achèvement de son usine d’acide, en raison de « l’impossibilité de faire venir les experts de mise en service nécessaires sur le site, compte tenu des restrictions de voyage et des mesures de distanciation sociale ». Ce retard a conduit la compagnie à rapatrier plus de 300 sous-traitants indiens.
Le gouvernement s’inquiète également du fait que la faiblesse du cours du cuivre pourrait avoir pour effet de ralentir le développement de nouvelles mines au Congo. Toutefois, en mai, Ivanhoe a déclaré que les récents événements n’avaient pas affecté le calendrier de développement du projet Kamoa-Kakula, et que le démarrage de la production était toujours prévu pour le troisième trimestre 2021.
Impact sur le secteur du pétrole et du gaz
Le poids du secteur pétrolier eu égard à l’ensemble des revenus extractifs a été de 11 % en 2017. Le pays cherche à attirer des investissements et à augmenter la production. Toutefois, les investissements seront probablement freinés compte tenu des cours actuels du pétrole, de la réduction de la demande et des difficultés financières auxquelles sont confrontées les compagnies pétrolières et gazières.
Impact sur les revenus du secteur extractif
La RDC dépend fortement de l’exploitation minière pour générer les revenus et faire entrer les devises au pays. Le secteur minier contribue environ à 30 % du PIB et, selon les données du FMI, il a représenté plus de 90 % des exportations totales au cours des cinq dernières années. Le gouvernement n’a pas encore fourni d’estimations concernant la diminution des revenus provenant du secteur extractif. Le groupe de réflexion Congo Challenge, conduit par le professeur Augustin Matata, ancien Premier ministre, a prédit une baisse de 20 % des recettes publiques provenant des secteurs du cuivre, du cobalt et du pétrole, hormis les revenus générés par les entreprises publiques. À court terme, la pandémie pourrait affecter plus directement les droits de douane applicables au secteur minier qui constituent, selon une étude en cours menée par NRGI, la plus importante contribution au budget de l’État.
Au mois de mai, le Conseil des ministres a approuvé une réduction de 35 % du budget national comme étant l’effet de la pandémie sur les recettes publiques. Initialement, le budget voté pour 2020 prévoyait des recettes intérieures de 8,3 milliards de dollars US, en supposant que 2,41 milliards proviendraient du secteur extractif, dont 2,15 milliards du secteur minier et 262 millions de dollars US de la production pétrolière. Les gouvernements locaux des régions productrices qui, depuis 2018, ont reçu des paiements directs des compagnies minières, subiront également un contrecoup. Leurs revenus proviennent surtout d’une partie des redevances payées, qui sont basées sur le chiffre d’affaires des entreprises.
L’entreprise minière d’État, la Gécamines, compte sur les revenus qu’elle perçoit au titre de ses projets de coentreprise et qui sont basés sur le chiffre d’affaires ou la production de ses partenaires. Comme plusieurs de ses opérations minières en coentreprise en sont maintenant au point mort, la Gécamines disposera de moins de liquidités pour ses propres activités et pour les reversements à l’État.
Impact sur la problématique de la gouvernance des ressources naturelles
Le processus ITIE en RDC connaît des difficultés structurelles et financières. Au mois d’octobre 2019, le Conseil d’administration de l’ITIE avait accordé un délai de 18 mois à la RDC pour adopter treize « actions correctives ». Cependant, les restrictions de mouvement, conjuguées aux limitations financières entravant l’action du gouvernement, font que ces actions correctives risquent d’être fortement compromises, ce qui retardera d’autant le processus de Validation de la RDC en tant que pays membre de l’ITIE.
Au moment de la rédaction de la présente note, le salaire du personnel de l’ITIE-RDC n’est pas payé depuis environ cinq mois. Bien qu’un nouveau Coordonnateur ITIE ait été sélectionné, l’Ordonnance de sa nomination n’a toujours pas été signée par le Président de la République. Très probablement, ce retard dans la nomination du nouveau Coordonnateur paralysera les plans de travail de l’ITIE-RDC et affectera la publication de son rapport de rapprochement 2018. Les donateurs sont désireux de soutenir le processus ITIE en RDC, mais attendent un signal du gouvernement démontrant son engagement, en particulier la signature d’une série des textes juridiques. Il s’agit entre autres de l’Ordonnance de nomination du Coordonnateur national, du décret sur la propriété effective et celui sur la structure révisée de l’ITIE. Les projets de deux derniers textes juridiques sont en souffrance depuis plus d’un an.
Mis à part le processus ITIE, la RDC affronte aussi depuis un certain temps une série de difficultés liées à la gouvernance du secteur extractif. Une des questions en marge de la pandémie, et qui doit être surveillée, a trait à la déclaration du ministère des Mines selon laquelle une réduction des impôts et redevances dans le secteur extractif serait une option, même si elle est encore lointaine pour l’instant. Le gouvernement avait mis en place des mesures de soutien au secteur en 2008, en réaction à la crise financière mondiale. Toutefois, les répercussions et l’efficacité de ces mesures n’ont pas été suffisamment analysées.
Perspectives d’avenir
Dès le mois de mars, le gouvernement a mis en place un groupe de travail chargé d’élaborer un plan de relance. Son rapport n’a pas encore été rendu public. Le pays espère profiter de la reprise de la demande et des prix des minerais stratégiques. Cependant, sans une meilleure gestion du secteur minier, les revenus attendus risquent de ne pas se concrétiser. Les réformes en vue d’une meilleure gouvernance dans le domaine des industries extractives restent indispensables pour l’avenir économique de la RDC. L’une des plus impératives reste la réforme des entreprises extractives publiques telle que la Gécamines, compte tenu, en particulier, de leur rôle dans la gestion du secteur minier et la génération de recettes, ainsi que pour l’approfondissement de la transparence, si nécessaire au secteur afin d’aider à éradiquer la corruption. Alors que le FMI et d’autres organismes prêteurs s’engagent avec la RDC et l’aident à absorber l’impact de la pandémie de coronavirus, l’adoption de ces réformes doit néanmoins rester une priorité absolue. En septembre 2019, le FMI avait déclaré qu’une révision de la gestion de l’entreprise d’État Gécamines était urgemment nécessaire.
Dans le cas où le gouvernement envisageait l’adoption d’une réforme fiscale quelconque dans le secteur minier, la prudence devrait toutefois guider les responsables dans cette voie. Le secteur est hétérogène et les impacts peuvent varier d’un sous-secteur à l’autre, et même d’un projet à l’autre. Toute réponse fiscale devra contenir une définition précise des objectifs poursuivis et les responsables devront veiller à ce qu’ils puissent être effectivement atteints.
Jean-Pierre Okenda est responsable pays pour la RDC chez NRGI.
Intégrer les déclarations ITIE : opportunités et risques pour la participation de la société civile
Le passage à des déclarations intégrées joue un rôle central pour l’avenir de l’ITIE, une norme mondiale qui a pour vocation de promouvoir la transparence et la redevabilité dans l’industrie pétrolière, gazière et minière. Une telle intégration, c’est-à-dire l’abandon progressif de rapports spécifiques classiques pour compiler les déclarations ITIE en faveur de déclarations systématiques et publiquement accessibles faites par les gouvernements et les entreprises conformément aux exigences de la Norme ITIE, peut potentiellement améliorer l’actualité, la pertinence contextuelle et la qualité des données publiées. Bien que les changements attendus offrent diverses opportunités de renforcer le rôle de la société civile, bien des acteurs au sein de cette dernière s’inquiètent aussi de voir l’intégration compromettre la nature multipartite de l’ITIE. Dans le contexte plus large d’attaques persistantes contre les libertés fondamentales, les valeurs démocratiques et le dialogue ouvert entre gouvernants et gouvernés (ci-après le terme « espace civique » englobera ces différentes notions), la crainte est grande de voir la société civile progressivement mise à l’écart de la prise de décision nationale relative à la gestion des ressources naturelles.
Cette note de travail a pour objectif de contribuer au débat naissant sur l’intégration des déclarations ITIE, à travers une analyse détaillée des opportunités et des risques qui en découlent pour la société civile. Ce faisant, nous espérons suggérer des pistes d’action aux acteurs impliqués dans les processus ITIE, notamment son Conseil d’administration, son Secrétariat international, les partenaires de développement et les groupes multipartites nationaux, afin de répondre aux préoccupations de la société civile, encourager la participation de celle-ci aux processus d’intégration, et surtout, de promouvoir la généralisation de la consultation et de la participation de la société civile en tant que telles. Pour ce faire, nous commençons par expliquer en quoi consiste l’intégration. Nous présentons ensuite quatre opportunités et trois préoccupations clés fréquemment soulevées en lien avec le rôle de la société civile dans les processus ITIE. Pour chacune de ces préoccupations, nous identifions différents moyens permettant aux acteurs desdits processus d’appuyer, en particulier au niveau national, une participation pleine, active et effective de la société civile dans la transition vers des déclarations intégrées. Les approches suggérées s’appliquent à toutes les étapes de l’intégration, depuis la planification et la procédure de demande jusqu’à la supervision de la mise en oeuvre.
Prêts adossés à des ressources naturelles: pièges et potentiel
Lire le communiqué de presse ici.
Pour arriver à financer leur progrès, les pays en développement doivent inévitablement trouver les moyens de relever les défis qui se présentent à eux. L’un des problèmes majeurs auxquels ces pays sont confrontés tient au fait que les investisseurs les perçoivent souvent comme présentant un risque financier élevé, ce qui limite leur capacité à accéder aux marchés internationaux de capitaux. Lors de la période de boom des ressources naturelles amorcée au début du millénaire, un nouveau modèle de financement s’est popularisé afin de contourner ces risques. En vertu de ce modèle de financement, dénommé « prêt adossé à des ressources naturelles » (en anglais resource-backed loans, ou RBL), les pays se voient accorder un accès à des fonds en échange de, ou garantis par de futurs flux de revenus provenant de leurs richesses naturelles.
Nous passons en revue les diverses expériences vécues relativement aux RBL par plusieurs pays de l’Afrique subsaharienne et de l’Amérique latine de 2004 à 2018. Notre but consiste ici à identifier les risques et opportunités présentés par les RBL, ainsi qu’à fournir des recommandations aux pays qui envisagent de souscrire des RBL à l’avenir.
Nous avons répertorié 52 RBL, 30 desquels ont été conclus par des pays d’Afrique subsaharienne, et 22 par des pays d’Amérique latine. Ils sont répartis sur 14 pays dans ces deux régions. Trente-huit d’entre eux ont été consentis par des banques de développement chinoises, sept par des négociants en matières premières, quatre par d’autres entreprises d’État chinoises, un par la Korea Exim, un par le Nigéria et un autre par Rosneft. Quarantetrois des prêts sont adossés au pétrole, six à divers minéraux, deux au cacao, et un au tabac. Le montant total des prêts répertoriés dans notre ensemble de données s’élève à 164 milliards de dollars US, 66 milliards desquels ont été consentis à l’Afrique, et 98 milliards ont été consentis à l’Amérique latine.
Notre étude des expériences vécues par ces pays, dont nous discutons en détail dans ce document de stratégie, souligne cinq principaux risques et quatre principales opportunités liés aux RBL. Nous y abordons également le panorama général et les termes des RBL, ainsi que leur impact sur les finances publiques.
Innovations de la nouvelle législation minière de la RDC : opportunités, défis et perspectives de mise en oeuvre
La République démocratique du Congo a promulgué le code minier révisé le 9 mars 2018 et son règlement minier le 8 juin 2018. Ce nouveau cadre législatif contient plusieurs avancées et innovations qui, adéquatement appliquées, peuvent significativement améliorer la gouvernance du secteur minier et apporter d’importantes retombées économiques et sociales aux citoyens.
On trouve parmi ces progrès l’intégration de bonnes pratiques en matière de transparence et de redevabilité, de partage des revenus entre le pouvoir central et les entités étatiques décentralisées, de contribution au développement communautaire ou encore de contenu local. Le nouveau cadre législatif répond juridiquement à un nombre considérable de frustrations communautaires, qui sont accentuées par la faible contribution du secteur au développement. Le code s’aligne également sur les bonnes pratiques internationales en matière de transparence et de redevabilité qui, lorsqu’elles sont mises en oeuvre, peuvent considérablement améliorer la gouvernance du secteur.
Cependant, il y a un risque important que les divergences sur les aspects fiscaux monopolisent l’attention des parties prenantes et que la mise en oeuvre des autres dispositions soit reléguée au second plan. Par ailleurs, ces avancées et innovations législatives ne suffisent pas à elles seules pour atteindre les objectifs ayant fondé la révision de la législation minière. Pour que la mise en oeuvre du cadre légal soit effective, il est urgent que le gouvernement prenne les mesures d’application restantes et renforce les capacités de l’administration publique.
Selon l’Indice de gouvernance des ressources naturelles, il existe dans 26 des 28 pays évalués en Afrique subsaharienne un « écart entre les règles et les pratiques », c’est-à-dire entre ce que les lois stipulent et la manière dont la gouvernance des ressources naturelles se déroule dans la pratique. Cette situation empêche les pays de recueillir les fruits de leurs investissements dans les réformes juridiques. Toujours dans le même indice, les secteurs des mines et des hydrocarbures de la RDC ont obtenu respectivement les notes de 35/100 et de 25/100. Ces mauvais scores sont principalement attribués à l’écart entre le cadre légal et sa mise en oeuvre2, et montrent que l’application effective des lois demeure l’un des principaux défis qui affectent la gouvernance du secteur des ressources naturelles en RDC.
Dans un pareil contexte, la réforme du code minier et de son règlement n’a donc été qu’un premier pas. La connaissance du nouveau cadre légal ainsi que l’appropriation des opportunités et défis inhérents à sa mise en oeuvre par les acteurs clés constituent une étape décisive vers la réalisation des objectifs qui ont conduit à sa révision. Dans cette optique, la présente note analyse certaines opportunités offertes par le nouveau cadre légal, en décrivant pour chacune d’elles les défis subséquents de mise en oeuvre pour lesquels des actions additionnelles demeurent requises.
L’Indice de Gouvernance des Ressources Naturelles : Rapport de l’évaluation intermédiaire 2019 pour la Guinée (exploitation minière)
Veuillez trouver plus d’informations y compris les données et justifications détaillées de l’évaluation intermédiaire pour la Guinée sur le site du Resource Governance Index.
Ce rapport présente les résultats et recommandations de l’évaluation de la gouvernance minière en Guinée sur les années 2017 et 2018, selon la méthodologie de l’Indice de Gouvernance des Ressources Naturelles (RGI). NRGI a publié cette évaluation intermédiaire en 2019 uniquement pour la Guinée afin de prendre en compte les réformes mises en œuvre par le gouvernement guinéen sur la période 2017-2018 et d’élaborer des recommandations dans un contexte expansionniste pour le secteur minier national. Les résultats 2019 ne sont pas comparables aux autres pays inclus dans l’édition de 2017 du RGI, mais permettent de suivre la trajectoire de la Guinée dans le temps.
Par rapport à l’édition 2017 du RGI, la Guinée gagne 12 points et voit son score s’établir à 56 points sur 100, permettant ainsi au pays d’accéder à la tranche de performance suivante1. Bon nombre d’améliorations importantes ont été observées dans la composante « réalisation de la valeur », dont les règles de droit et les pratiques évaluées sont pour la plupart sous la tutelle du ministère des Mines et la Géologie. Le score de cette composante se situe désormais dans la plus haute tranche de performance, en raison de l’amélioration significative dans chacune des sous-composantes, avec notamment les procédures d’octroi des permis miniers et la gestion de la SOGUIPAMI, et la divulgation de statistiques sectorielles désagrégées.
La composante « gestion des revenus » connait une évolution significative avec un score de 52 contre 27. Les ministères du Budget, de l’Economie et des Finances, des Mines et de la Géologie, et de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation peuvent accélérer cette tendance positive en mettant en application le transfert infranational avec le Fonds national de développement local (FNDL) qui profitera à l’ensemble des communes du pays.
Concernant la troisième composante, « conditions générales de gouvernance », le score baisse légèrement.
Par ailleurs, l’édition 2017 du RGI révélait un écart important entre les scores moyens pour les règles de droit (77) et pour les pratiques (45) de gouvernance. On observe sur la période d’évaluation une amélioration substantielle des pratiques, avec l’écart qui se réduit de 17 points.
Les mécanismes d’appui au développement local dans la législation minière en Guinée
Depuis 2014, la Guinée connaît une forte croissance de son secteur minier. En trois ans, la production de bauxite est passée de 20,2 millions de tonnes (Mt) en 2014 à 51,7 Mt en 2017, soit une augmentation moyenne de 37 % par an, et les perspectives de production sur les prochaines années s’inscrivent dans la même tendance. Pour les communautés proches des mines, les impacts négatifs se mêlent aux retombées positives. La série de tensions communautaires observées en 2017 dans la principale région bauxitique, Boké, a souligné l’urgence non seulement de traiter les impacts négatifs des activités minières, mais aussi d’amplifier les retombées positives au niveau local. Ceci passe en particulier par l’application de l’ensemble du dispositif prévu dans le code minier pour soutenir le développement local. Le présent document s’adresse à l’ensemble des parties prenantes du secteur minier en Guinée. Outil à visée pédagogique et de plaidoyer, il entend contribuer à accélérer, à l’échelle locale, les réformes minières engagées depuis 2011, en vue d’une plus grande diversification économique et d’un développement plus inclusif.
Messages clés
- En 2016, les revenus miniers reversés aux communes étaient de 61 milliards de GNF (6,7 millions d’USD), soit 2% des revenus issus du secteur extractif et 0,5% du budget national de la Guinée ; ils pourraient dépasser les 400 milliards de GNF annuels à partir de 2020.
- Les revenus miniers locaux étaient composés à 72% des paiements sociaux des entreprises envers les communautés, et le Fonds national de développement local (FNDL) en aurait représenté 61% s’il avait été effectivement reversé aux communes.
- Les mécanismes de traçabilité, de transparence et de redevabilité sur les différents flux de paiements locaux, ainsi que les compétences, doivent être renforcés dans les communes pour garantir l’efficacité de l’utilisation de ces revenus.
- Avec les budgets qui vont augmenter de manière inédite dans l’ensemble des communes du pays au cours des prochaines années grâce aux revenus miniers locaux, l’Etat doit instaurer des règles de discipline budgétaire dans les communes pour limiter leur dépendance vis-à-vis des revenus miniers.
- Grâce à ces nouveaux revenus, les communes guinéennes pourraient s’investir dans de nouveaux champs d’intervention, comme le soutien massif à l’entrepreneuriat local, notamment dans l’agriculture familiale et l’industrie manufacturière locale, pour à la fois diversifier leurs sources de revenus et contribuer, depuis la base, à l’effort national de diversification économique.
L’Indice de Gouvernance des Ressources Naturelles : Vers la mise en pratique des réformes légales en Afrique subsaharienne
Note de presse
Ce rapport explore les réussites et les difficultés communes associées à la gouvernance des ressources naturelles en Afrique subsaharienne, en puisant dans la foule de données et la multitude de documents fournis par l’Indice de Gouvernance des Ressources Naturelles. Bien que nous détections des tendances communes dans l’ensemble de la région, nous constatons qu’il existe également une grande diversité entre les pays et au sein de ceux-ci. Ce rapport présente des exemples de bonnes pratiques dont les responsables d’autres pays pourraient s’inspirer. Nous concluons en suggérant aux décideurs politiques, aux parlementaires, à la société civile, aux médias et aux institutions régionales de s’attacher davantage à réduire l’écart entre les règles et les pratiques, dans le souci de contribuer à rétablir la confiance entre l’État, les communautés et les investisseurs, ainsi qu’à renforcer la gestion durable des ressources naturelles. Créer un espace pour le débat public, renforcer les capacités des institutions publiques et des acteurs de surveillance comme la société civile, le media tant que les institutions supérieures de contrôle, affirmer de la volonté politique et tirer les enseignements des réformes juridiques antérieures sont des pistes de solutions pour combler l’écart entre les règles et les pratiques.
Messages clés
- De nombreux pays d’Afrique subsaharienne ont procédé à d’importantes réformes légales dans les domaines du pétrole, du gaz et de l’exploitation minière au cours des dernières décennies. L’Indice de gouvernance des ressources naturelles révèle que, dans tous les pays évalués en Afrique subsaharienne à l’exception de deux d’entre eux, il existe un « écart entre les règles et les pratiques », c’est-à-dire entre ce que les lois stipulent et la manière dont la gouvernance des ressources naturelles se déroule dans la pratique. Cette situation empêche les pays de recueillir les fruits de leurs investissements dans les réformes légales.
- Entre 2000 et 2016, 22 des 28 pays d’Afrique subsaharienne, inclus dans l’Indice de gouvernance des ressources naturelles, ont renouvelé ou modifié leurs lois régissant le secteur pétrolier, gazier ou minier. C’est dans les pays où la réforme légale est plus récente que la mise en oeuvre des dispositions relatives à la transparence et à la redevabilité est la plus en retard.
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Plus encore que des pays d’autres régions, les pays d’Afrique subsaharienne sont confrontés à des problématiques associées :
- au respect des engagements de transférer des revenus pétroliers, gaziers et miniers aux autorités locales
- à la publication d’informations sur les impacts sociaux et économiques de l’extraction
- à la conformité aux règles fiscales
- à la gouvernance des entreprises publiques et des fonds souverains.
- Pour combler ces lacunes, les gouvernements et d’autres parties prenantes doivent concentrer leurs efforts sur la mise en oeuvre et l’application des règles de transparence et de redevabilité. Ils doivent également investir dans la capacité de suivi des agences gouvernementales, renforcer le rôle des auditeurs et des parlements et veiller à ce que les différentes parties prenantes disposent de l’espace nécessaire pour remettre en question les politiques. La consultation des parties prenantes aidera les gouvernements à concevoir des lois adaptées à la capacité institutionnelle et aux objectifs politiques de chaque pays et à évaluer ce qu’il convient de faire pour une mise en oeuvre efficace avant même que les lois ne soient adoptées, réduisant ainsi l’intervalle de temps entre la législation et sa mise en oeuvre.
Les règles budgétaires face à la baisse du prix des matières premières
La fiscalité du nouveau code minier de la République Démocratique du Congo
En 2016, NRGI publiait le rapport Sortir de l’impasse fiscale, et appelait le gouvernement à poursuivre la réforme du code minier. En effet, le code minier de 2002, qui avait largement contribué à accroitre les investissements dans le Congo d’après-guerre, nécessitait une mise à jour pour bénéficier davantage aux populations locales et assurer une meilleure répartition de la rente minière entre l’Etat et les investisseurs privés.
La fiscalité minière est déterminante pour les ambitions de la RDC. Trop élevée, elle pourrait décourager les investisseurs et accélérer la recherche de substituts au cobalt dans les technologies de batteries électriques. Trop laxiste, elle priverait les Congolais de recettes publiques essentielles pour le développement du pays au profit d’une industrie dominée par des entreprises étrangères. C’est pourquoi la révision du code minier en mars puis du règlement minier en juin 2018 est d’une importance critique pour les citoyens congolais.
L’objet de cette note est de :
- Fournir une mise à jour de l’analyse de la fiscalité minière congolaise réalisée dans le cadre de la publication Sortir de l’impasse fiscale de NRGI, en ajoutant aux modèles économique et financiers les paramètres finaux de la réforme du code minier.
- Identifier les forces et faiblesses de la nouvelle fiscalité minière et les risques liés à certaines nouvelles dispositions.
- Contribuer à une meilleure compréhension de l'impasse actuelle entre le gouvernement et les représentants de l'industrie sur le régime fiscal du code minier.
Une fiscalité plus équilibrée est essentielle pour que le secteur minier congolais profite à tous, et NRGI reste engagé à appuyer les parties prenantes dans la poursuite de cet objectif.
Examen de la propriété réelle : mesures pratiques pour réduire les risques de corruption dans les procédures d’octroi de licences extractives
Dans la plupart des pays riches en ressources naturelles, lorsqu’une entreprise cherche à obtenir des droits d’exploration ou d’exploitation pétrolière, gazière ou minière, les règles de l’industrie exigent que les régulateurs vérifient certaines informations fondamentales avant d’octroyer une licence et le contrat s’y rattachant à l’entreprise. Fréquemment, par exemple, le régulateur est censé juger la compétence technique, la santé financière et la conformité environnementale et sécuritaire de l’entreprise. Toutefois, en général, les règles d’octroi de licence n’exigent pas l’examen des intérêts possibles des fonctionnaires dans l’entreprise soumissionnaire, ce qui pourrait créer de graves conflits d’intérêts. Nous avons étudié plus de cinquante lois minières et pétrolières et nous avons constaté qu’environ la moitié contient des interdictions aux fonctionnaires ou à leurs associés proches (souvent dénommés « personnes politiquement exposées » [PPE]) de détention d’intérêts dans les entreprises qui soumettent des demandes de licences extractives, mais aucune n’exige que les régulateurs vérifient effectivement si des intérêts de telles PPE existent dans le cadre de la procédure d’évaluation des demandes de licences. Ceci constitue une lacune potentiellement essentielle dans la supervision réglementaire, ne fût-ce qu’en raison qu’une grande partie des cas réels suggère que la capacité à dissimuler le vrai propriétaire réel d’une entreprise est un instrument principal de corruption dans l’octroi de droits extractifs.
Un nombre croissant d’Etats développent actuellement des politiques juridiques et des systèmes d’information pour la collecte et la publication des données concernant les propriétaires réels des entreprises extractives, les vraies personnes qui possèdent, contrôlent ou profitent économiquement d’une entreprise. Ces réformes vont de la modification des lois d’enregistrement des entreprises et la création de registres publics nationaux jusqu’à des approches spécifiques à l’industrie telles que l’établissement de lois sur la transparence dans le secteur extractif et des exigences en matière d’octroi de licences. Toutefois pour qu’elles aient un impact, les réformes du secteur extractif peuvent devoir aller au-delà de l’exigence de divulgation de la propriété réelle, nommément en instiguant des règles sur les types de relations de propriété réelle devant être considérés comme des délits d’initié ou de la corruption, et en déterminant les conséquences applicables à de telles infractions. Notre étude a montré qu’un certain nombre de pays a déjà mis en vigueur de telles règles, mais la surveillance et l’application sont lacunaires. Compte tenu des risques de corruption, l’amélioration des politiques et pratiques nationales dans l’adjudication des licences extractives doit être à l’avant-plan de ces efforts.
La présente note fournit des conseils sur la manière dont les Etats peuvent renforcer leurs politiques et procédures d’adjudication de licences pour répondre aux risques fondamentaux de corruption que présentent les relations problématiques de la propriété réelle. Cette note est donc organisée autour des cinq aspects suivants de la procédure d’octroi des licences extractives, avec des recommandations et des exemples de dispositions légales que les intervenants nationaux peuvent utiliser à chaque étape :
- dispositions de lutte contre la corruption — définition de la base juridique de lutte contre la corruption dans le secteur extractif ;
- présélection / soumissions des demandes — collection et publication des informations concernant la propriété réelle ;
- examen initial — disqualification des soumissions présentant des problèmes manifestes d’exactitude et de corruption ;
- procédure adjudicative — examen des risques posés par les propriétés réelles problématiques dans les soumissionnaires
- mesures complémentaires — utilisation de la divulgation des informations relatives à la propriété réelle pour lutter contre la corruption.